top of page

Djibouti, un pays "pré-émergent" aux pieds d’argile

Dernière mise à jour : 30 déc. 2023


Îlot de stabilité dans une région instable, Djibouti a su profiter de sa position stratégique pour générer une croissance solide et régulière depuis plus d’une décennie. Des performances économiques qui restent pourtant relatives et fragiles.

Lac Abbe, sur la frontière entre Djibouti et l’Ethiopie.

S’exprimant lors des rencontres « Africa 2016 », qui se sont tenues fin septembre 2016 à Paris, Hassan Houmed Ibrahim, le ministre djiboutien délégué chargé du Commerce et des PME, a parfaitement résumé l’atout maître de son pays : « Djibouti bénéficie d’une position géographique privilégiée entre trois continents ; l’Afrique, l’Europe et l’Asie ».

Un carrefour stratégique

Membre du COMESA (Common Market for Eastern and Southern Africa), le marché commun de l’Afrique orientale et australe (plus de 500 millions d’habitants), la petite nation de la Corne africaine est d’abord la porte d’entrée naturelle de l’Ethiopie, un marché de près de 100 millions de consommateurs, avec lequel elle partage depuis peu une nouvelle ligne ferroviaire reliant le port de Djibouti à Addis-Abeba.

Une vocation de hub dont Djibouti a su pleinement tirer parti pour attirer les investisseurs venus de tous horizon et ce en se positionnant notamment sur les services tels que la logistique, la finance et les télécoms. Selon les données publiées par la Banque mondiale, Djibouti a ainsi bénéficié en 2015 d’un apport d’investissements directs étrangers de 123,9 millions de dollars. Un montant conséquent en grande partie issu des revenus de l’exploitation portuaire ; sans parler des recettes tirées de la location de bases militaires par les troupes françaises, américaines, espagnoles, allemandes, italiennes, japonaises et chinoises (les flux annuels générés par les contingents militaires étrangers contribuent chaque année à hauteur de 100 millions de dollars au budget de l’État).

Pas étonnant dans ces conditions que les principaux indicateurs macroéconomiques penchent dans la bonne direction. La croissance moyenne annuelle au cours de la dernière décennie s’est élevée à 4,5 % par an et 2017 ne devrait pas déroger à cette tendance positive : les autorités ont révisé à la hausse leurs prévisions pour cette année, avec un taux attendu de 7 %. De quoi faire pâlir d’envie bien des pays.

Des points de blocage

Toutefois, plusieurs handicaps pourraient venir ébranler les fondations du modèle économique djiboutien. En premier lieu, les ressources issues de ces flux d’investissements directs étrangers ne sont pas réorientées vers des priorités nationales telles que la santé ou l’éducation. Mais surtout, le pays ne connait pas une croissance inclusive génératrice d’emplois. Près de 25% de la population vit ainsi dans la pauvreté et le taux de chômage touche environ la moitié de la population active. Une situation qui rappelle que l’embellie économique profite d’abord aux travailleurs expatriés. On observe également un contraste saisissant entre l’importance des flux financiers extérieurs, consacrés aux projets de grands travaux et estimés à des milliards d’euros, et l’insuffisance des crédits accordés aux entrepreneurs djiboutiens, en raison de la frilosité des banques locales.

Qui plus est, cet afflux massif de capitaux internationaux a aussi son revers : la dépendance financière à l’égard d’entités étrangères. Au premier rang de ces partenaires venus d’ailleurs et de plus en plus indispensables à Djibouti, la Chine. Principal partenaire économique du pays avec plus du tiers des importations totales djiboutiennes (37%) selon l’Observatory of Economic Complexity, la Chine est aujourd’hui la principale source de financement des grands projets d’investissements, surtout dans le domaine ferroviaire, portuaire et aéroportuaire. Les signes de ralentissement économique dans l’Empire du Milieu pourraient cependant se traduire par une interruption de nombre de grands chantiers d’infrastructures à Djibouti. Une catastrophe potentielle pour le pays, qui rencontre d’ores et déjà de plus en plus des difficultés à respecter le calendrier du remboursement de ses emprunts. Sa dette publique est élevée et, selon les prévisions du Fonds Monétaire International (FMI), elle atteindrait 79 % du PIB national en 2017. Déjà, en décembre 2015, l’institution financière tirait la sonnette d’alarme en expliquant dans son rapport que « le niveau élevé des dépenses publiques d’investissement exerce une pression considérable sur les finances publiques et la dette extérieure ».

Autant de défis qui devront être relevés avec succès si Djibouti veut pérenniser sa croissance tout en faisant profiter toute sa population.

Lire la suite sur le site de Forbes Afrique


 

© Copyright
bottom of page